Marcher de village en village : Itinéraires emblématiques des Cévennes à découvrir à pied

30/10/2025

Pourquoi relier les villages cévenols à pied ?

Sillonnant la Lozère, le Gard ou l’Ardèche méridionale, les Cévennes déploient une toile fascinante de hameaux à flanc de montagne, d’anciens chemins muletiers et de vallées escarpées. S’aventurer à pied de village en village, c’est plonger au cœur de leur histoire et de leur tissu vivant. Dans ces paysages classés Réserve de biosphère par l’UNESCO (UNESCO), la randonnée prend une dimension humaine singulière. Les villages cévenols, souvent perchés et disséminés, sont les témoins d’un mode de vie où la distance entre deux clochers a toujours été une invitation au voyage, au partage et à la découverte.

Contrairement à d’autres massifs où la traversée s’effectue de refuge en refuge, ici, ce sont les bourgs, les églises romanes, les places centrales ou les moulins qui jalonnent le parcours. Chaque étape, même brève, offre l’occasion de tisser des liens, de goûter des produits locaux ou tout simplement de prendre le temps – “prendre la Cévenne”, selon l’expression locale.

Les grands classiques : itinéraires balisés pour relier villages et hameaux

De nombreux itinéraires permettent de relier plusieurs villages cévenols, sur quelques heures ou plusieurs jours. Voici une sélection des plus emblématiques :

Le chemin de Stevenson (GR®70)

  • Itinéraire : Du Monastier-sur-Gazeille (Haute-Loire) à Saint-Jean-du-Gard (Gard)
  • Distance totale : Environ 272 km
  • Villages traversés : Le Bleymard, Florac, Saint-Étienne-Vallée-Française, Cassagnas, Saint-Jean-du-Gard, entre autres.
  • Caractéristiques : Emprunté dès 1878 par l’écrivain écossais Robert Louis Stevenson et sa célèbre ânesse Modestine, ce sentier mythique suit la “transhumance intérieure” à travers le Gévaudan, le mont Lozère, la vallée du Tarn et les pentes cévenoles. Il a vu passer, en 2023, près de 14 000 randonneurs sur tout ou partie de ses étapes (selon l'Association Sur Le Chemin de Stevenson).
  • À savoir : Le sentier se prête parfaitement à la découverte des villages, car chaque étape s’achève au cœur d’un bourg vivant, souvent animé par des marchés ou des fêtes de saison.

Le Tour des Cévennes (GR®67)

  • Itinéraire : Boucle au départ d’Anduze ou de Saint-Jean-du-Gard, avec passage par le Vigan, Barre-des-Cévennes, Saint-Germain-de-Calberte…
  • Distance totale : 117 km, soit 7 à 8 jours de randonnée.
  • Villages traversés : Saint-Jean-du-Gard, Anduze, Saumane, Barre-des-Cévennes, Saint-André-de-Valborgne, Le Vigan.
  • Caractéristiques : Ce sentier contourne le cœur du Parc national, enchaînant les vallées et les crêtes, avec un patrimoine vernaculaire exceptionnel : calades, ponts anciens, terrasses, vieux châtaigniers.
  • Infos pratiques : L’hébergement est possible en chambres d’hôtes ou gîtes dans presque chaque village-étape. L’itinéraire est balisé intégralement.

L’ancienne draille de Margeride (GR®43/Stevenson alternatif)

  • Itinéraire : Du Bleymard à Florac, via Bagnols-les-Bains, Fraissinet-de-Lozère, Ispagnac.
  • Ambiance : Une voie pastorale ancestrale, utilisée durant des siècles pour conduire les troupeaux de brebis de la Margeride aux pentes plus douces des Cévennes.
  • Villages traversés : Nombreux petits bourgs de Lozère, souvent hors des sentiers battus.

Quelques “petites” traversées entre villages pour randonneurs curieux

Au-delà des GR, la Cévenne se prête merveilleusement bien à de courtes traversées, pour une immersion en quelques heures ou sur un week-end.

De Saint-Germain-de-Calberte à Saint-Étienne-Vallée-Française

  • Distance : 14 km (environ 4 heures de marche)
  • Atouts : Ce tronçon du GR 70 traverse la vallée du Gardon et fait découvrir deux villages emblématiques. Saint-Germain, village protestant marqué par l’histoire des Camisards et son église “au clocher tronqué”, domine la vallée. Arrivée à Saint-Étienne, cœur palpitant de la vallée, réputé pour ses marchés de producteurs et ses fêtes du bâton de pèlerin.

La boucle Saumane - Saint-Jean-du-Gard - Corbès

  • Durée : 3 à 5 heures selon la boucle choisie.
  • Originalité : Possibilité de combiner chemins balisés et anciens drailles, avec un passage remarquable par la forêt domaniale de l’Aigoual.
  • Ambiance : Faïsses, terrasses et potagers hors du temps, apparition de hameaux minuscules, franchissement du Gardon sur l’un des plus vieux ponts de la région.

Le “Sentier des drailles” entre Barre-des-Cévennes, Les Ayres et Racoules

  • Distance : 21 km (6 heures de marche)
  • À voir : La traversée de hameaux chargés d’histoire, dans un espace particulièrement préservé du Parc national. Nombreuses traces d’habitat cévenol traditionnel, orgues basaltiques, sources et passage sur le chemin historique des muletiers.

De hameau en bourg : pourquoi ces traversées sont-elles si singulières ?

  • Histoire vivante : Les sentiers reliant les villages suivent souvent d’anciennes drailles, calades ou chemins de contrebandiers, qui ont structuré les échanges locaux et la vie quotidienne. Le terme “draille” désigne ces parcours pastoraux essentiels, aujourd’hui entretenus et valorisés par des associations ou le Parc national (Parc national des Cévennes).
  • Architecture et patrimoine : Les traversées permettent d’observer la remarquable adaptation des hommes au relief : maisons de schiste ou de granit, granges à foin, fours à pain, moulins, anciens relais de poste.
  • Rencontres : Ateliers d’artisans, cafés associatifs, marchés paysans sont des pauses inoubliables sur l’itinéraire.
  • Défis physiques : Les Cévennes sont tout sauf plates ! Il n’est pas rare de franchir 400 à 800 m de dénivelé positif en une demi-journée sur un chemin reliant deux bourgs voisins.
  • Anecdote : Le territoire reste l’un des plus faiblement peuplés de France (14,3 hab/km2 en Lozère – INSEE 2021), ce qui fait qu’on peut marcher des heures entre deux villages sans croiser âme qui vive… la vraie définition de l’authenticité pour beaucoup !

Infos pratiques pour organiser son itinérance village à village

  • Topo-guides et cartographie : Les guides de la FFRandonnée (FFRandonnée) ou les applications IGN Rando et Outdooractive fournissent tracés fiables et points d’intérêt.
  • Hébergement : Chambres d’hôtes, gîtes d’étape, camping à la ferme, accueil chez l’habitant : la région mise sur la diversité, jusque dans les micro villages. Pensez à réserver en avance en saison (juin-septembre).
  • Transports : Nombre de villages sont desservis par des bus (LIO Occitanie), mais la desserte reste limitée en dehors des grands bourgs. Anticipez votre retour, ou optez pour des navettes privées proposées par certains hébergements.
  • Éco-responsabilité : Les sentiers traversent des zones Natura 2000 et des sites sensibles : il est impératif de respecter la signalétique, de refermer les barrières pastorales, et de rester discret pour préserver la faune (aigle royal, chevreuil).
  • Enfants, ânes, VTT : Certains tronçons GR ou PR se prêtent très bien à la rando avec enfants ou bagages portés par un âne (loueurs à Florac, Saint-Jean-du-Gard…).

Des idées de traversées originales pour prolonger l’aventure

  • Le chemin de la Regordane (GR®700) : Moins connu, cet itinéraire historique de transhumance (du Puy-en-Velay à Saint-Gilles-du-Gard) permet de passer par Génolhac, Chamborigaud, Alès, avec de nombreuses variantes villageoises.
  • Entre L’Estréchure, Soudorgues et Monoblet : Moins fréquenté, ce secteur propose des liaisons par des drailles à travers la châtaigneraie et de minuscules bourgs vivants toute l’année. La route croise jardins partagés, sculptures en land-art, fermes, et moulins à laine en activité (ex : filature du Mazel à L’Estréchure).
  • Traversée des hameaux oubliés du Bougès : À partir de Saint-Maurice-de-Ventalon, direction l’Hospitalet, Vialas et Pont-de-Montvert. Des villages souvent minuscules, certains dépeuplés, avec parfois moins de 50 habitants, où le temps paraît suspendu.

Pour les passionnés de patrimoine, notez que de nombreux tronçons des sentiers traversant plusieurs villages sont aujourd’hui inclus dans le Répertoire du patrimoine communal et bénéficient de chantiers de restauration portés localement (murets, fontaines, lavoirs). Toute randonnée est aussi un geste de soutien à cette dynamique, en s’arrêtant chez les petits commerçants, en participant à la vie locale, ou parfois même à de véritables chantiers bénévoles.

L’esprit des traversées villageoises dans les Cévennes

Marcher dans les Cévennes, de village en village, c’est renouer avec l’essence de la découverte : le plaisir de la surprise derrière chaque col, la convivialité ou la discrétion de chaque hameau, l’émotion simple de voir s’ouvrir la porte d’une boulangerie au bout du chemin. Hors des circuits touristiques sur-fréquentés, ces itinéraires sont sans cesse réinventés par ceux qui les empruntent, en toute liberté.

Que ce soit pour une boucle de deux jours ou pour une itinérance au long cours, marcher de village en village dans les Cévennes offre une immersion privilégiée dans la vie locale, la diversité paysagère et le patrimoine d’une région à la fois rude et généreuse. Pour celles et ceux qui aiment vivre la randonnée autrement, c’est une invitation à l’authenticité, et parfois même à l’aventure humaine sous le signe de la lenteur.

Retrouvez d’autres récits de traversées villageoises, des portraits d’habitant·es et des conseils pratiques tout au long de l’année sur Espace Cévennes, Terres de Découvertes.

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